Travaux
de Recherche
Modélisation
des processus physico-chimiques d'intérêt géologique
en collaboration avec Bertrand Guillot (LPTMC).
- Etude par dynamique moléculaire des
propriétés thermodynamiques, dynamiques et structurales
des silicates naturels fondus.
- Solubilité des gaz rares et dégazage du
manteau terrestre
Propriétés
génériques et universalité en fragmentation
en
collaboration avec Heli Hietala, Serguei Mechkov et François
Sausset, (étudiants
en thèse ou en stage de Master M2 au LPTMC).
Des noyaux
atomiques aux
supernovae, en passant par les assiettes et les roches, tout
système
physique peut être fragmenté, à condition de lui
apporter une énergie suffisante par rapport à son
énergie de cohésion. La fragmentation joue un rôle
fondamental dans des domaines aussi variés que la
détermination du diagramme de phase de la matière
nucléaire, les éruptions volcaniques, ou la formation
des planètes. Par ailleurs, environ 30% de la consommation
totale d'énergie dans le monde est utilisée lors de
processus industriels de fragmentation. Malgré cette
diversité
d'échelles de longueurs et de matériaux, la
fragmentation présente des comportements
génériques,
peut-être universels. Ainsi, la distribution en taille des
fragments obéit fréquemment à une loi de
puissance caractérisée par un exposant noté τ.
Cette loi d'échelle, mise en évidence par des
expériences en laboratoire ou des observations de
phénomènes
naturels, suggère l'existence de classes d'universalité
en fragmentation. Mais à ce jour, les théories et
modèles ne parviennent pas à rendre compte de la
dispersion des valeurs mesurées de l'exposant τ (entre 1 et
2.5 environ). La question de l'universalité en fragmentation
reste donc ouverte.
La dynamique
moléculaire
est un outil idéal pour étudier ce
phénomène
irréversible et fortement hors d'équilibre qui pourrait
dépendre de nombreux paramètres comme la dimension de
l'espace, la forme, la taille ou le matériau de l'objet.
Le
système modèle
que nous proposons est constitué de particules
bidimensionnelles interagissant par un potentiel central de type
Lennard-Jones, avec une attraction à courte portée pour
décrire les interactions à une échelle
mésoscopique. Dans un premier temps, nous avons choisi
d'étudier la fragmentation d'un disque envoyé contre un
mur avec une certaine vitesse d'impact, le paramètre de
contrôle de cette étude. Les calculs de dynamique
moléculaire permettent alors de suivre l'évolution du
système et de calculer la distribution en taille des
éventuels
fragments. Notons que nos résultats sont peu sensibles au
choix du potentiel d'interaction, ce qui indique une certaine
universalité, confirmée par des expériences.
  
Figure 1 : Fragmentation d'un disque
contre un mur à différents instants étudiée
(par des simulations de dynamique moléculaire). Les particules
sont colorées en fonction de leur énergie potentielle :
les particules bleues sont fortement liées à leurs
voisines, les rouges sont libres.
A faible
vitesse
d'impact, le disque rebondit sur le mur après avoir subit des
déformations élastiques, voire plastiques. Lorsque la
vitesse d'impact augmente, le disque se fragmente.
A suivre...
Gélification des suspensions
colloïdales
en
collaboration avec
Antonio Coniglio, Antonio de Candia, Emanuela del Gado, Analisa
Fierro et Marco Tarzia de l'université Federico II de Naples,
Italie.
Une
suspension colloïdale
est un ensemble de particules mésoscopiques dispersées
dans un fluide porteur. Ces particules peuvent être solides ou
liquides (on parle alors d'émulsions) et leur taille est
typiquement comprise entre quelques nanomètres et quelques
micromètres. Cette définition très
générale
regroupe une large variété de systèmes
physico-chimiques présents dans la nature (comme le sang ou le
lait) et dans le monde industriel (par exemple la peinture et les
produits cosmétiques et agro-alimentaires).
En modifiant
les
propriétés physico-chimiques d'une suspension
colloïdale, les expérimentateurs peuvent contrôler
les interactions entre les particules et en particulier choisir la
portée et l'intensité de l'interaction attractive, qui
est typique des fluides simples atomiques. Ainsi, depuis une dizaine
d'années, des expériences sur les systèmes
colloïdaux ont mis en évidence des comportements
thermodynamiques (transitions de phase) et dynamiques (transition
vitreuse) rappelant ceux des systèmes atomiques. Mais à
la différence de ces derniers, la grande taille des particules
- comparée à celle des atomes du fluide porteur - non
seulement facilite une observation directe et l'étude de leurs
propriétés dynamiques, mais donne également lieu
à des phénomènes mal compris comme la
gélification colloïdale : à basse fraction
volumique, et lorsque l'attraction entre les particules est
élevée
(ou à basse température), les particules ont tendance
à
former des amas dispersés dans une phase
désordonnée
(« cluster phase ») observée par
microscopie confocale (voir figure 1). Puis, en augmentant la fraction
volumique, le
système présente les propriétés
viscoélastiques et la dynamique lente d'un gel.

Figure
1 : Suspension colloïdale (particules de PMMA) observée par
microscopie confocale à une fraction volumique Φ=0.094 (à
gauche) et Φ=0.156 (à droite). La barre blanche correspond
à une longueur de 20 μm. D'après Campbell et al., Phys. Rev. Lett. 94, 208301 (2005).
Pour mieux comprendre les
mécanismes sous-jacents à la gélification
colloïdale, nous avons proposé un modèle simple,
basé sur un potentiel d'interaction de type DLVO
présentant
une attraction à très courte portée et une
barrière répulsive à longue portée, due
aux charges résiduelles observées à la surface
des particules. L'étude de ce modèle par des calculs de
dynamique moléculaire a porté sur :
-
les
propriétés thermodynamiques : détermination du
diagramme de phase, révélant la présence d'une
phase désordonnée et de différentes phases
modulées : une phase colonnaire constituée de colonnes
parallèles dont les axes sont placés sur un réseau
triangulaire et une phase lamellaire (voir figure 2).
-
les
propriétés structurales : calculs du facteur de
structure, de la distribution en taille des amas et de leurs rayons de
giration (estimation de la dimension fractale).
-
les
propriétés dynamiques : calculs des fonctions de
corrélation à deux temps et d'autocorrélation des
liens entre particules permettant d'estimer le temps de relaxation
structurel et la durée de vie des liens.

Figure
2 : Images obtenues par des simulations de dynamique moléculaire
: colonnes parallèles dont les axes sont placés sur un
réseau triangulaire (à gauche) et phase lamellaire
(à droite). D'après De Candia et al.,
Phys. Rev. E 74, 010403 (2006).
Nos
résultats
suggèrent le scénario suivant de la gélification
colloïdale, résultant de la compétition entre
attraction à courte portée et répulsion à
longue portée : en augmentant la fraction volumique, des amas
stables et compacts (« cluster phase », phase
désordonnée) s'agrègent malgré la
répulsion et forment des structures allongées qui
à
leur tour s'enchevêtrent pour former un réseau percolant
(le gel) décrit par les exposants critiques de la percolation
aléatoire. La gélification se produit lorsque le temps
de relaxation structurel, qui augmente avec la fraction volumique,
devient du même ordre de grandeur que la durée de vie
des liens entre particules. L'étude du diagramme de phase
montre que le gel est métastable par rapport aux phases
modulées (colonnaire et lamellaire). Dans une suspension
colloïdale, les inhomogénéités locales, la
polydispersité des particules ou la viscosité du fluide
porteur empêcheraient donc le système d'atteindre
l'équilibre thermodynamique et favoriseraient la formation du
gel. Ce scénario a été confirmé par les
récentes expériences d' Andrew I. Campbell et de ses
collaborateurs à l'Université de Bristol.
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